PORTANT REFORME DE L'ARCHEOLOGIE PREVENTIVE ADOPTE AU CONSEIL DES MINISTRES DU 5 MAI 1999 adoptée à l'unanimité lors de l'Assemblée Générale du 10 octobre 1999, à Besançon. notamment par la Fédération Lorraine d'Archéologie) [ UNE LOI POUR QUI? ] - [ REFLEXION GLOBALE ] - [ CONCLUSION ] 1) L'analyse des motifs et du projet de loi met en lumière des formulations ambiguës, voire contradictoires, notamment pour ce qui concerne les relations entre l'éventuel EPA et les autres acteurs de l'archéologie. En effet, il est dit dans le chapître intitulé Les mesures proposées que : "pour la réalisation des opérations de terrain et des études, l'établissement public s'appuiera, chaque fois que cela apparaîtra nécessaire pour des raisons scientifiques ou d'efficacité, sur le réseau institutionnel que constituent le Centre national de la Recherche scientifique et les Universités, mais également sur les services archéologiques des collectivités territoriales, les associations et autres structures de droit privé qualifiées." Dans sa rédaction définitive (art. 2, fin du 2 ème alinéa), le projet de loi traduit ainsi l'intention énoncée : "Pour l'exécution de sa mission, l'établissement public peut faire appel, par voie de convention, à d'autres personnes morales dotées de services de recherche archéologique. (...)" Les membres des différents réseaux visés s'interrogent sur le sens à donner à ces éléments de phrase : "...chaque fois que cela apparaîtra nécessaire..." ou : "...peut faire appel...". L'expérience prouve que l'actuelle AFAN n'a jamais souhaité, sinon en de rares occasions, faire appel aux organismes cités. En pratiquant un comportement de monopole systématique, elle considère en effet qu'elle seule doit intervenir et justifie son choix en invoquant de fausses raisons de sécurité et de travail au noir pour écarter les autres participants. Quel sens donner aussi à cette formulation : "personnes morales dotées de services de recherche archéologique" ? 2) Dans le même paragraphe, il est également proposé que : "les représentants des principales catégories d'acteurs concernés par l'archéologie préventive participeront à la gestion administrative et scientifique de l'établissement au travers de leur représentation au sein de son conseil d'administration ou de son conseil scientifique." Il y a tout lieu de penser que les autres organismes n'auront aucun pouvoir dans la nouvelle structure et que leur présence, par ailleurs mal définie (on ignore par qui ils seront représentés, dans la mesure où le choix se fera par décret) sera purement formelle, tout au plus pour servir de caution. Ainsi, en réservant à l'EPA l'exclusivité de fait de l'archéologie préventive, le projet de loi aboutit à officialiser l'exclusion dont sont déjà victimes les personnes physiques ou morales étrangères à l'AFAN. 3) Les services de l'Etat (SRA, CIRA) seront à leur tour dépossédés de leurs prérogatives et dans l'impossibilité d'exercer un réel contrôle sur le futur organisme. 4) Quant au rôle de diffusion des résultats que devrait remplir le nouvel organisme, l'expérience démontre que, depuis 10 ans, l'AFAN n'a pas été en mesure de diffuser le résultat de ses opérations de terrain. Pourquoi et comment l'EPA serait-il en mesure de le faire demain quand on sait que les aménageurs n'accepteront pas de financer les longues études d'analyses post-fouilles ni les publications ? 5) La redevance.
En résumé, il faut retenir de ce projet de loi :
II. NECESSITE
D'UNE REFLEXION GLOBALE 1) L'archéologie est une composante indissociable de la recherche historique. A ce titre, il ne peut y avoir d'archéologie justifiée par la seule urgence. Toute enquête doit s'inscrire dans une réflexion thématique qui suppose une programmation et un travail de synthèse. C'est pourquoi il convient :
Rien ne justifie que les fonctionnaires relevant d'un établissement public scientifique ou de la fonction publique territoriale ne soient pas, face au cadre législatif et réglementaire qui régit l'archéologie française, traités sur un pied d'égalité par rapport au personnel du nouvel établissement public pour l'archéologie préventive. 2) L'archéologie est une composante indissociable d'une politique patrimoniale. Les opérations de fouilles préventives devront obligatoirement être associées aux organismes locaux qui oeuvrent pour la connaissance et la protection du patrimoine (dépôts d'objets dans les musées régionaux, départementaux ou locaux sans délai ; rapport versé obligatoirement après le chantier dans un délai n'excédant pas un an ; participation des archéologues territoriaux aux fouilles préventives de façon prioritaire). Il convient ici d'insister sur le fait que rien ne justifie la mise à l'écart des archéologues bénévoles, le plus souvent formés sur les bancs des universités françaises. Leur implication au niveau local ou régional, leur bonne connaissance du milieu, leurs patientes recherches conduites durant leurs temps de loisirs, leurs actions auprès du grand public, en font indiscutablement des partenaires indispensables pour la mise en valeur et la protection du patrimoine archéologique , "source de la mémoire collective européenne et instrument d'étude historique et scientifique" (Convention de Malte, 1992). 3) Une archéologie ouverte. A une époque où toutes les structures nationalisées et étatisées sont soumises à une politique d'ouverture, il convient de s'inspirer de pratiques qui, à l'étranger, donnent des éléments de solution, comme au Royaume-Uni. L'Etat doit faire confiance aux initiatives d'organismes divers pour assurer l'exécution de fouilles. Il doit permettre à des personnes physiques ou morales de répondre à des appels d'offre gérés par les SRA d'après des critères de qualités scientifiques et techniques définis dans un cahier des charges. Le chantier du château de Mayenne qui a fait l'objet d'une telle procédure et qui a été confié à une équipe anglo-saxonne est une démarche qui doit servir d'exemple. Cette formule permettrait :
Elle introduirait une indispensable souplesse dans la gestion
de l'archéologie. III. CONCLUSION Le monopole et l'exclusion, déjà pratiqués et que le projet de loi aggrave de fait, n'aboutiront qu'à accentuer les dysfonctionnements observés depuis des années. Ceux-ci contraindront immanquablement les autorités à réexaminer le problème à court terme. La loi risque d'être caduque avant même d'être adoptée. Alors pourquoi tant de précipitation aboutissant à un texte que nous ne pouvons accepter (nous ne sommes pas les seuls à le refuser) ? En vérité, sous couvert de légiférer en un domaine où, c'est exact, existait un vide juridique (l'archéologie préventive), n'a-t-on pas cherché uniquement à légitimer l'AFAN, ses pratiques et son monopole de fait ? Même sérieusement amendé, ce texte conservera ses objectifs fondamentaux. Nous en demandons le retrait et la remise en chantier de la réflexion globale que nous appelons de nos voeux. Fédération française d'archéologie 10 octobre 1999 Contacts: Fédération
Française d'Archéologie Tel/FAX : 03.81.50.50.17 Voir aussi : http://www.britarch.ac.uk/forum/ffa.html
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